Le pool des juges Antimafia de Palerme (1980-1990)


Le pool antimafia de la décennie (1980 – 1990) était composé de magistrat extrêmement courageux. Ces hommes de loi devaient non seulement se battre contre la mafia, mais également contre l’Etat et le Conseil supérieur de la magistrature qui ne comprenait pas grand chose à la dangerosité des organisations criminelles.

Il fut d’abord réticent à la spécialisation des juges et à la centralisation des enquêtes sur Cosa nostra. Lorsque Rocco Chinnici inventa le pool antimafia ce fut une véritable révolution : les informations sur la mafia pouvaient enfin être centralisées par des experts en la matière. Cette initiative conduisit le pool à instruire le « Maxi procès » de Palerme qui permis la condamnation des principaux acteurs de Cosa nostra.

Rocco Chinnici
Rocco Chinnici

Les juges du pool travaillaient ensemble avec force et professionnalisme. La volonté de Rocco Chinnici était de changer la mentalité des gens en ébranlant les consciences. Chinnici a commencé à promouvoir et à participer à des débats dans les écoles, à parler aux jeunes dans les festivals de la jeunesse, dans les rues, lors de tables rondes afin de vaincre une fois pour toutes à la culture mafieuse. Plus tard, jusqu’à la fin de sa vie, une fois son travail terminé, Paolo Borsellino se rendait à la rencontre des jeunes pour les rendre acteurs de la lutte contre la mafia.

Pour commencer, le pool antimafia développa des nouvelles synergies importantes avec la police judiciaire. Ensuite, il mit en place des nouvelles règles pour sélectionner les jurés participants aux procès. Ceux-ci étaient jusque-là, victimes de terribles pressions de la part de Cosa nostra. Le pool s’activa également à tracer les capitaux financiers de la mafia.

Le pool travailla sans relâche pendant des années. Rocco Chinnici s’activait auprès de sa hiérarchie pour que leur travail soit reconnu et valorisé. Puis le 4 août 1983, le juge Rocco Chinnici est tué par une voiture piégée. La mafia pensait couper la tête du pool antimafia, mais son assassinat eut l’effet inverse et une mobilisation générale contre la mafia débuta dans l’esprit des citoyens. Antonino Caponnetto arrive à Palerme pour remplacer Chinnici. Les applaudissements des Siciliens donnèrent du courage aux magistrats du pool qui ne se sentirent plus complètement isolés.

En 1984, Tommaso Buscetta et Vito Ciancimino (ancien maire de Palerme) sont arrêtés. Les révélations de Buscetta sont les prémices du Maxi procès de Palerme. La mafia lance un assaut implacable et plonge la Sicile dans un bain de sang.

Pool antimafia de Palerme
Pool antimafia de Palerme

Au terme du Maxi procès, avec le départ à la retraite de Caponnetto, tout le monde pensa que Giovanni Falcone allait devenir le successeur idéal. Mais l’organe suprême de la magistrature en décida autrement après des heures de débat animés et parfois dramatiques entre les partisans et les opposants de Falcone. Ce fut le juge Antonino Meli qui fut choisi en vertu de son ancienneté, alors qu’il n’avait aucune expérience dans la lutte contre le crime organisé. Caponnetto très amer après cette décision dénudé de logique dit cette phrase terible : « Giovanni Falcone a été abandonné, il a commencé à mourir ».

Dès sa prise de fonction, Meli prendra des décisions absurdes et entrava sans cesse l’action du pool antimafia avant que ce dernier ne soit peu à peu dissout.

C. Lovis, auteur des Hommes de l’antimafia
Crédit Photographie Giornale L’Unita

2 commentaires

  1. Je partage votre commentaire. Dans mon livre « Les hommes de l’antimafia », j’évoque ce passage de témoin en pleine guerre mafieuse. Il est vrai qu’il fallait une énorme dose de courage pour s’engager à Palerme quand on sait que c’était devenu la ville la plus dangereuse du monde. Une guerre qui a fait environ 1000 homicides dans les années 80′.

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  2. Il faut dire que la décision du juge Caponnetto est la preuve d’un courage (malheureusement) hors du commun puisque c’est de son propre chef qu’il pris la suite de Chinnici, afin de permettre à ce pool de continuer son travail. Et on se souvient de son visage dévasté, le désespoir incarné, après l’attentat qui coûté la vie à Borsellino et son escorte : « E finito tutto, é finito tutto… ». Chaque fois que je revois ces images j’ai envie de pleurer de rage…

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